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Talibans et pavot à opium : faut-il s’attendre à une interdiction de la culture ?

En 2000, les talibans étaient au pouvoir et en raison de l’interdiction officielle de la culture de l’opium, le marché mondial a chuté de 65 %. Déjà à cette époque, les talibans tentaient de faire reconnaître leur régime par la communauté internationale et prenaient leurs distances avec la production d’opium. Le mollah Mohammed Omar, alors chef des talibans, a déclaré que « la culture de l’opium n’est pas islamique » et que quiconque en cultive devrait être sévèrement puni. Mais en 2001, les talibans ont perdu le pouvoir et la production a recommencé à croître.

Pendant la période de domination américaine, plusieurs campagnes antidrogue actives ont été menées, notamment entre 2005 et 2008, les forces américaines ont pulvérisé des produits chimiques sur les champs de pavot, ce qui a entraîné une détérioration significative de la vie des communautés locales, ainsi que des problèmes majeurs dans relations entre Kaboul et Washington. En savoir plus à ce sujet dans le matériel sur le Portail TalkingDrugs).

Mais après avoir dépensé au total plus de 9 milliards de dollars sur 20 ans dans la lutte contre la drogue en Afghanistan, force est de constater que leur production n’a fait qu’augmenter de manière significative au fil des années.

Selon un rapport du Congressional Research Center obtenu par CNN, le budget du Bureau américain de contrôle des stupéfiants en Afghanistan pendant la présidence de George W. Bush est passé de 3.7 milliards de dollars en 2004 à 16.8 milliards de dollars en 2008. Cependant, en 2009, Richard Holbrooke, spécialiste du L’envoyé américain en Afghanistan et au Pakistan a qualifié le programme américain de lutte contre les stupéfiants de « programme le moins efficace de tous les temps ». Ainsi, la dure politique américaine d’éradication des cultures de pavot à opium, qui a principalement touché les communautés agricoles pauvres, « a conduit la population locale à soutenir pleinement les talibans », concluent les experts.

En 2020, même en pleine pandémie de coronavirus, la superficie cultivée en pavot à opium en Afghanistan a augmenté de 37 %. Comme l'écrit Meduza, les talibans, selon les experts de l'ONU, gagnent de l'argent à la fois en cultivant du pavot dans leurs propres champs et en obtenant de l'opium dans leurs propres laboratoires, et en rendant hommage aux commerçants indépendants pour le transport de marchandises à travers leur territoire.

En plus de l'héroïne, les talibans a commencé à gagner de l'argent de la production de méthamphétamine. Si en 2014, seuls 10 kilogrammes de méthamphétamine afghane ont été saisis dans le monde, alors au cours du seul premier semestre 2019, 650 kilogrammes ont été saisis. Parallèlement, selon l'ONU, en 2020, plus de 60 % des laboratoires de méthamphétamine étaient situés dans des territoires contrôlés par les talibans.

Selon des organisations internationales comme l’OTAN, les talibans ne profitent pas seulement de la production de drogue. Comme Radio Free Europe écrit, les experts de l'OTAN notent la diversification des revenus des talibans : au cours de l'exercice précédent, les talibans ont gagné 1.6 milliard de dollars. Parmi eux, 416 millions provenaient du trafic de drogue, 450 autres de l'exploitation minière et 160 des tributs collectés par le groupe auprès des commerçants légaux dans les territoires sous son contrôle. Durant cette période, les talibans ont reçu 240 millions supplémentaires de leurs sponsors, principalement du Pakistan et des États du Golfe. Cette nouvelle répartition des revenus, selon les experts, rend les talibans moins dépendants de la position et des pressions de la communauté internationale.

Bien que les talibans soient sur la voie de l’indépendance financière et politique, il est peu probable qu’ils entament sérieusement la lutte contre les producteurs locaux d’opium. Selon l'expert britannique Jonathan Goodhand dans un commentaire pour Agence France-Presse, un véritable abandon de la drogue pourrait conduire à un conflit au sein même des talibans. D’un côté, les talibans veulent montrer qu’ils sont prêts à dialoguer avec l’Occident, et renoncer à la drogue est un bon moyen d’y parvenir. En revanche, souligne l'expert, cela frappera durement les agriculteurs des provinces clés de Helmand et de Kandahar pour les talibans.

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